215 millions d’enfants travaillent dans le monde

A l’occasion de la Conférence internationale sur le travail des enfants, qui rassemble plus de 80 pays à La Haye, aux Pays-Bas, les 10 et 11 mai, le Bureau international du travail (BIT) a rendu public un rapport quadriennal dans lequel il s’inquiète du relâchement des efforts déployés pour éradiquer les pires formes de travail des enfants.En 2006, le deuxième rapport quadriennal du BIT était encourageant. Partout dans le monde, le travail des enfants était en fort recul et une éradication complète des pires formes de travail pouvait être envisagée par le BIT à l’horizon 2016.

Quatre ans plus tard, l’optimisme a laissé place à l’inquiétude. Indépendamment de la récession économique mondiale dont les effets sont encore difficiles à évaluer, le nombre d’enfants travaillant dans le monde est passé de 222 à 215 millions, soit une baisse de 3% seulement entre 2004 et 2008, souligne le BIT dans sont troisième rapport quadriennal intitulé « Accélérer l’action contre le travail des enfants ».

« Ce chiffre montre un ralentissement du rythme de réduction à l’échelle mondiale. Les progrès sont irréguliers : ni assez rapide, ni suffisamment étendus pour atteindre les buts que nous nous sommes fixés », explique le Directeur général du BIT, Juan Somavia, qui réclame de nouveaux efforts à grande échelle. « Nous devons amplifier notre action, passer à la vitesse supérieure », insiste-t-il, prônant le lancement d’une campagne globale pour redynamiser la lutte contre le travail des enfants.

Même conclusion pour la Directrice du Programme international pour l’abolition du travail des enfants (IPEC), Constance Thomas, qui regrette que la diminution du travail des enfants à l’échelle mondiale soit désormais « plus lente et plus modeste ». Elle rappelle que sur les 215 millions d’enfants qui travaillent encore aujourd’hui dans le monde, 115 millions sont exposés à des « travaux dangereux », un qualificatif souvent utilisé pour évoquer les pires formes de travail.

Le rapport montre que si le schéma d’ensemble de réduction du travail des enfants a été préservé, la situation est contrastée en fonction du sexe, de l’âge et des régions du monde.

Les progrès les plus substantiels concernent les enfants âgés de 5 à 14 ans, une tranche d’âge où le nombre d’enfants au travail a baissé de 10% globalement et de 31% quand il s’agit de travaux dangereux. Autre tendance satisfaisante, le travail des filles dans cette tranche d’âge a diminué de 15% par rapport à 2006. « En fait, l’essentiel du déclin mondial résulte de la réduction du nombre de filles impliquées », souligne Constance Thomas. Elle s’inquiète en revanche de l’augmentation de 7% du nombre de garçon âgés de 5 à 14 ans qui travaillent. Un chiffre qui prend des proportions alarmantes pour la tranche 15-17 ans, avec 62 millions d’adolescents au travail, contre 52 millions en 2006, soit une hausse d’environ 20%.

L’analyse par région proposée par le rapport quadriennal fourni aussi des éléments importants pour l’organisation de la prévention et de la lutte contre le travail des enfants. Elle montre notamment qu’en Asie, dans le Pacifique, en Amérique latine et dans les Caraïbes, le travail des enfants continue de diminuer, alors qu’en Afrique subsaharienne, il continue d’augmenter, faisant même de cette région du monde la zone géographique où la proportion d’enfants qui travaillent est la plus forte, avec un enfant sur quatre.

Selon Constance Thomas, l’Afrique reste d’ailleurs l’un des défis majeurs de la lutte contre le travail des enfants, au même titre que la modernisation de l’agriculture – secteur d’activité qui emploie le plus grand nombre d’enfants – et la lutte contre les formes dissimulées du travail des enfants, qui sont souvent les pires. « La méthode pour résoudre le problème qui prend ses racines dans la pauvreté est claire », souligne-t-elle. « Il faut s’assurer que tous les enfants ont accès à une éducation de qualité, il faut des systèmes de protection sociale qui assistent les familles les plus démunies pour scolariser leurs enfants, il faut s’attaquer à la pauvreté en garantissant aux adultes des possibilités d’emplois décents ». Autant de mesures qui doivent être encouragées en dépit du contexte de crise, car « soit les gouvernements l’utilisent comme une excuse supplémentaire pour réduire les dépenses sociales fondamentales telles que l’éducation et l’aide internationale, soit ils la considèrent comme une chance pour mobiliser la volonté politique nécessaire et donner la priorité à l’élimination du travail des enfants, en le considérant comme un investissement propice au développement ».

Source : BIT, ONU (communiqué)

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