Burkina Faso : la plus vaste épidémie de rougeole en plus de 10 ans

Alors que les fonctionnaires de santé ont entrepris des campagnes de vaccination en Afrique de l’Ouest pour lutter contre les épidémies de méningite et de poliomyélite, au Burkina Faso, la rougeole a pris le pas sur ces deux maladies dans la plus vaste épidémie qu’ait connu le pays depuis plus d’une décennie, d’après le ministère de la Santé.Considéré comme la principale cause de mortalité infantile par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le virus de la rougeole, contre lequel il existe un traitement préventif, se transmet par la toux et les éternuements.

Ousmane Badolo, épidémiologiste au sein du ministère burkinabè de la Santé, a déclaré à IRIN que plus de 19 000 cas de rougeole, et 150 décès, ont été recensés depuis le 5 avril. Ce chiffre est 10 fois plus important que celui des années précédentes, depuis 1997. « Nous sommes inquiets car nous sommes confrontés à un nombre croissant d’infections ».

Selon M. Badolo, la dernière épidémie comparable est celle de 1997, au cours de laquelle 32 000 cas avaient été signalés.

Fenella Avokey, membre d’une équipe inter-pays de soutien de l’OMS, basée au Burkina Faso, a déclaré à IRIN que l’épidémie de rougeole actuelle était exceptionnelle, alors que la tendance est plutôt au déclin des infections à travers le monde. « Nous n’avons pas [observé] cela depuis un bon moment… Ce à quoi nous assistons aujourd’hui est en quelque sorte sans précédent par rapport à il y a cinq ans ».

En 2007, d’après les estimations, la rougeole a emporté 197 000 enfants à travers le monde – soit une baisse de 74 pour cent par rapport à l’année 2000, selon l’OMS.

Lancée en 2001 par l’OMS, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), la Croix-Rouge américaine, les centres américains pour la lutte et la prévention des maladies (CDC) et la Fondation de l’ONU, l’Initiative rougeole a pour objectif de faire chuter la mortalité associée à la rougeole par le biais d’un renforcement du financement des campagnes de vaccination et d’éducation dans 47 pays à risque, notamment le Burkina Faso.

Au Burkina Faso, la dernière campagne de vaccination de masse contre la rougeole a été menée en décembre 2007, et a permis d’immuniser plus de trois millions d’enfants âgés de neuf mois à cinq ans, selon le gouvernement.

Cycles d’infection

Interrogée sur les raisons d’une telle recrudescence de l’infection cette année, Mme Avokey, de l’OMS, a répondu à IRIN que certains enfants échappaient aux campagnes de vaccination systématique et de masse, ce qui multiplie les risques d’épidémie. « Nous ne parvenons pas à vacciner nos enfants. [Ensuite], le nombre de [personnes] vulnérables se développe, et celles-ci deviennent au bout d’un moment des proies faciles pour le virus de la rougeole ».

Les pays dans lesquels 80 pour cent seulement de la population environ est immunisée lors de vaccinations systématiques ou de masse peuvent s’attendre à des épidémies durables et de grande ampleur tous les trois ou quatre ans. En revanche, les pays qui immunisent au minimum 95 pour cent de la population – c’est notamment le cas de la Finlande – n’ont signalé aucune épidémie au cours de ces dernières années, d’après l’Initiative rougeole.

Le Burkina Faso se doit de procéder rapidement à des vaccinations de masse, mais le gouvernement doit préalablement déterminer le profil, l’âge et le lieu de résidence des victimes, afin de mieux lutter contre la propagation de la maladie, a indiqué M. Badolo, du ministère de la Santé. « Les personnes les plus vulnérables seront vaccinées, car nous ne disposons pas de réserves de vaccins illimitées pour la population toute entière », a-t-il précisé.

Les immunisations systématiques contre la rougeole, dont le coût s’élève à environ un dollar, sont recommandées dès la naissance. Elles doivent être suivies d’un rappel, qui permet de renforcer l’immunité, dans la mesure où 15 pour cent des vaccinations uniques s’avèrent inefficaces, d’après l’OMS.

L’Initiative rougeole estime que de 2000 à 2007, les vies de 11 millions de personnes ont pu être épargnées grâce à des programmes gouvernementaux de vaccination et d’éducation.

Partager cet article