Kirghizistan : violences interethniques

Les Nations Unies ont commencé à envoyer de l’aide en Asie centrale, où des dizaines de milliers d’Ouzbeks fuient le Kirghizistan après la flambée de violence interethnique dans le sud du pays. Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), plus de 75 000 Ouzbeks se sont déjà réfugiés en Ouzbékistan depuis vendredi.Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) va y déployer une équipe d’intervention composée d’experts spécialisés dans les opérations d’urgence et la logistique. L’agence onusienne va également mettre en place un pont aérien pour acheminer du matériel de secours de son entrepôt régional de Doubaï. Cet aide couvrira les besoins humanitaires immédiats de quelque 75 000 personnes.

Les affrontements interethniques qui avaient démarré dans la nuit de jeudi à vendredi à Och, se sont répandus pendant le week-end à d’autres localités du sud du pays, notamment la ville de Jalalabad. Au moins 124 personnes ont été tués, 1600 autres blessées et des dizaines de milliers ont fuit vers l’Ouzbékistan, qui leur avait ouvert sa frontière. Il l’a depuis refermé devant l’afflux massif de réfugiés, alors que 15 000 autres personnes attendent encore de la traverser pour trouver protection.

« Nous sommes très reconnaissants aux autorités ouzbèkes de l’accueil qu’elles offrent aux personnes fuyant la violence au Kirghizistan », a indiqué António Guterres, le Haut Commissaire de l’ONU pour les réfugiés. « Nous avons convenu avec le Gouvernement ouzbek que nous appuierons ses efforts et que nous porterons assistance aux dizaines de milliers de personnes, pour la plupart des femmes et des enfants, qui ont rejoint l’Ouzbékistan en quête de sécurité », a-t-il ajouté.

De son côté la Haut commissaire aux Droits de l’homme, Navi Pillay, a appelé en urgence les autorités locales et nationales du Kirghizistan « à prendre des mesures rapides et décisives pour protéger tous les citoyens, indépendamment de leur origine ethnique, et à mettre un terme aux violences ».

« Il semble qu’il s’agisse de meurtres sans distinction, qui visent aussi des enfants. Des viols ont également eu lieu sur la base de l’appartenance ethnique. C’est une situation très dangereuse, compte tenu de la mosaïque ethnique dans le sud du Kirghizistan et dans l’Ouzbékistan voisin », a-t-elle expliqué.

« Cela fait des années que l’on sait que cette région est une potentielle poudrière et pour cette raison, il est indispensable que les autorités agissent fermement pour faire cesser les violences, qui semblent avoir été orchestrées, ciblées et bien préparées, avant qu’elles ne continuent de se répandre », a poursuivit la Haut commissaire aux Droits de l’homme.

Alors que certains media ont rapporté que les forces de l’ordre kirghizes appliquaient une politique de « tirer pour tuer », Navi Pillay estimé que ce n’était « pas la solution au problème ».

« L’état d’urgence a été déclaré et c’est probablement la décision nécessaire dans de telles circonstances. Quoiqu’il en soit, le droit à la vie ne peut pas être écarté sous prétexte d’urgence. Les forces de sécurités doivent recevoir des instructions pour éviter l’usage excessif de la force et ne pas prendre parti dans le conflit, tout en agissant pour faire cesser les violences », a-t-elle conclu.

De son côté, l’UNICEF a exprimé sa profonde préoccupation quant à la situation des enfants, témoins ou victimes de ces violences. Dans un communiqué, l’agence onusienne indique qu’elle a reçu « des rapports alarmants faisant état d’enfants déplacés, traumatisés, séparés de leur famille et parfois tués ».

Elle demande en urgence à toutes les parties « de prendre les mesures nécessaires pour protéger les enfants », rappelant d’une part qu’ils sont « les plus vulnérables dans les situations de conflit », et d’autre part qu’aucun d’entre eux « n’est censé être impliqué dans ces violences ou participer à de quelconques manifestations ».

Dimanche, le Secrétaire général de l’ONU avait déjà eu un entretien téléphonique avec le ministre des Affaires étrangères du Kazakhstan, Kanat Sauabayev, dont le pays occupe la présidence de l’Organisation de la sécurité et de la coopération en Europe (OSCE).

Le Représentant spécial de Ban Ki-moon, Miroslav Jenca, qui dirige aussi le Centre régional pour la diplomatie préventive en Asie centrale (UNRCCA), s’est lui rendu sur place. Il devrait être rejoint dés aujourd’hui par les Représentants spéciaux de l’OSCE et de l’Union européenne.

En avril, le Kirghizistan a été le théâtre d’un soulèvement populaire qui a déposé le Président Kurmanbek Bakiyev. Un mois plus tard, des violences interethniques entre kirghizes et ouzbeks ont éclaté dans le sud du pays, le fief des partisans du président renversé. Selon la presse, la communauté ouzbek du sud du Kirghizistan lui était plutôt opposée.

Source : ONU (communiqué)

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